L’Office national de lutte contre la fraude et la corruption (OFNAC) vient de jeter un pavé dans la mare : un rapport accablant sur des malversations massives au Centre hospitalier régional (CHR) de Saint-Louis. Des fonds publics détournés, des achats fantômes, une gestion chaotique – tout y est. Alors que le pays célèbre ses Lions qualifiés pour la Coupe du Monde, cette bombe rappelle que la corruption ronge encore les artères vitales de la nation. Symbole d’un secteur santé en lambeaux, ou simple maillon d’une chaîne pourrie ?
Le Feuilletage du Rapport : Des Irrégularités Qui Puissent
Au menu de cette enquête n°03/2023, des faits datant de 2021 mais révélés avec fracas en 2025 : escroqueries fiscales, fraudes sur les deniers publics, et complicité active dans la dilapidation. Le CHR de Saint-Louis, censé être un pilier pour les 800 000 habitants de la région du Fleuve, a vu filer des centaines de millions de FCFA en contrats bidons et achats surévalués. Machines médicales défaillantes achetées à prix d’or, fournitures disparues dans la nature, salaires fantômes l’OFNAC dresse un tableau noir d’une structure où l’intérêt général s’efface devant les appétits personnels.
Les chiffres fustigent : un budget de 800 millions alloué par l’État, englouti sans trace tangible. Les syndicats, déjà vent debout en 2021, hurlaient à la « faillite totale » panne d’équipements, manque criant de médicaments, personnel démotivé. Aujourd’hui, ce rapport valide leurs cris : une vulnérabilité « élevée » aux fraudes, comme l’OFNAC le note dans son bilan 2024, où les hôpitaux figurent parmi les cibles prioritaires. Et pendant ce temps, les patients trinquent, entre files d’attente interminables et soins de fortune.
Au-Delà des Faits : Un Miroir des Dysfonctionnements Systémiques
Creusons : ce scandale n’est pas un accident isolé. Il s’inscrit dans une vague de 2024-2025 où l’OFNAC a explosé ses dossiers plus de 6 transmis au Pool judiciaire financier, touchant ministères, agences et établissements publics. À Saint-Louis, c’est l’héritage d’une gestion post-pandémie bâclée, amplifiée par une opacité chronique. Le CHR, flagship régional, illustre comment les fonds décentralisés fuient vers des poches privées, laissant les infrastructures en ruines. Ajoutez une dissolution imminente de l’OFNAC au profit d’une nouvelle entité anti-corruption, et le tableau s’assombrit : est-ce une purge nécessaire ou un moyen d’enterrer des enquêtes gênantes ?
Le timing est ironique : juste après un Conseil des ministres vantant la transparence budgétaire et l’autonomie financière. Où est la cohérence quand des hôpitaux saignent pendant que l’État mobilise 450 milliards via un appel à l’épargne ? Ces révélations forcent une introspection : la lutte anticorruption avance-t-elle vraiment, ou patine-t-elle dans les sables mouvants de la politique ?
Une Occasion Manquée de Rupture Vraie
Soyons francs : bravo à l’OFNAC pour avoir osé fouiller, mais ça sent le rapiéçage. Ce rapport, comme les précédents (2019-2023), déterre des horreurs sans que les têtes tombent vraiment.Nous voyons un échec collectif : gouvernements successifs qui promettent l’audit miracle, mais oublient les garde-fous formation des gestionnaires, whistleblowers protégés, audits en temps réel. À Saint-Louis, ce n’est pas qu’une affaire d’argent ; c’est une trahison envers une région oubliée, où la santé publique est un luxe. Si le nouveau régime de Faye veut crédibiliser sa « rupture », il doit transformer ces mots en actes : poursuites rapides, sanctions exemplaires, et un fonds de reconstruction pour les CHR délaissés. Sinon, c’est du vent qui nourrit le cynisme populaire.
L’Afrique en Quête de Santé Sans Faille
Ce cas saint-louisien résonne en écho africain. Au Nigeria, des scandales similaires ont vu des hôpitaux fédéraux siphonnés de milliards de nairas en 2024, forçant une réforme sous pression du FMI. Au Kenya, la corruption en santé a coûté 500 millions de dollars en fournitures fantômes l’an dernier, menant à des manifestations et une loi anti-fraude renforcée. Globalement, l’OMS alerte : en Afrique subsaharienne, 20 % des budgets santé fuient en corruption, freinant l’accès universel aux soins. Le Sénégal pourrait leader en intégrant l’OFNAC à un réseau ouest-africain, inspirant des modèles comme le Rwanda, où la traçabilité numérique a divisé les fraudes par trois. Mais sans volonté politique, on reste dans le cercle vicieux : aide internationale pompée, populations sacrifiées.
Le Verdict : Nettoyage ou Naufrage ?
L’OFNAC a ouvert la boîte à Dakar et à Saint-Louis de la refermer sans pitié. Ce scandale n’est pas qu’un rapport poussiéreux ; c’est un appel à l’urgence pour un système de santé qui ne soit plus un piège à corruption. Faye, Sonko, les ministres : agissez, ou l’histoire jugera. Les Sénégalais méritent des hôpitaux qui soignent, pas qui saignent. Le futur se joue maintenant – ne le ratez pas.
- octobre 16, 2025

